Rihoto Sako
Interprète un solo de Saburo Teshigawara
Maison de la culture de Grenoble (18 février 2011)
(Par Marie Malaspina)
En février dernier, la maison de la culture de Grenoble accueillait un cycle du chorégraphe Japonais Saburo Teshigawara et la compagnie Karas.(New national theatre Tokyo).
Ce cycle comportait trois pièces, deux solos et une pièce de groupe. Le 18 février 2011, Rihoto Sako assistante, interprète depuis 1996 de Saburo Teshigawara, danse le solo « she ». Sa voix off dit un poème qu’elle a écrit.
« ..J’ai surpassé toutes mes possibilités, jusqu’à ce que j’atteigne le sombre pouvoir du mystère.
Là j’ai entendu sans bruit.
Là j’ai vu, sans lumière… »
Lieu de fusion de la lumière, du mouvement, de l’espace, au milieu de la scène son corps vibrant révèle l’inconnu de nos perceptions. De la silhouette gracile de la danseuse s’expulse le déploiement d’un transport quasi amoureux qui saisit les spectateurs. Leurs énergies intérieures bouleversées par les infimes variations, les subtils tremblements, les reflets, les ombres projetées dans des rectangles de lumière convoquant Mandrian. Avec la danseuse ils rentrent dans la démesure onirique de son corps démultiplié sur les murs par les vagues d’une musique de transes.
Une toile prend vie sur scène sans pinceau, ni couleur, ni décor, en toute obscurité. Le noir parcouru, parfois de rares raies de lumières livre des passages vers l’ailleurs. Gouffres, sommets, nuages, cieux derrières ces portes invisibles affleurent nos images intérieures. Des échancrures abstraites et pures font place aux liens de nos cœurs. Le corps de Rihoto Sako passe imperceptiblement des apaisements éclatants et suaves, qui signifient la lumière, aux secousses barbares, trépanantes, trépidantes des jours sans respiration, dans un dialogue ininterrompu avec l’espace rythmique du plateau nu.
Rencontre des beaux arts, de la musique et de la danse, instant d’une fulgurance d’absolu.
L’être, par le corps androgyne de Rihoko Sato, s’y envole, s’y blesse, y demeure sans jamais s’épuiser. Récit de la quête de l’homme éclaté dans la multitude des fragments de lui-même.
L’incroyable est là, « elle » seule sur scène rend le vide charnel et chacun d’entre nous perçoit qu’il est plusieurs et le sait durablement.
A la sortie du spectacle le sentiment d’avoir été happée dans le lieu d’une offrande hors du commun, remplit de gratitude pour ces arts mêlés, pour l’engagement du chorégraphe et de la fragile et vigoureuse danseuse.
Si votre route croise ces artistes ne manquez pas d’aller les voir.
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