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Midi à l’ombre des rivières

14/04/2012 | Théâtre | 2 commentaires

Midi à l’ombre des rivières
Eric Massserey  
CamPoche  (2011)
Bernard Campiche éditeur

(Par Annie Forest-Abou Mansour)

image midi à l'ombre.jpgLe lecteur-spectateur de Midi à l’ombre des rivières  d’Eric Masserey assiste à un spectacle théâtral pur et plein. Dans  cinq petits  monologues  L’Oubli, Les Noyés, La Promesse, Maison à vendre, Main gauche et un dialogue à deux voix Mon amour et moi, tout est à la fois banal et paradoxalement étrange, inhabituel, original. Ce qui importe, au premier abord,  est ce qui se passe, ce qui se dit, non pas dans un lieu théâtral traditionnel, mais dans des espaces de jeu que traversent  des petits groupes de spectateurs au fur et à mesure que les pièces se terminent. Apparemment seul compte   ce qui se passe dans ce lieu où EST le spectateur qui cohabite avec le personnage, vivant le temps d’un instant ses longs monologues lyriques, portions de sa vie, de ses pensées, révélateurs de ses émotions, comme il pourrait le faire fortuitement dans sa vie quotidienne au hasard d’une rencontre. On est dans le prolongement du quotidien, dans la théâtralité  pure : la parole de l’un, l’écoute silencieuse de l’autre. Dans L’Oubli, une femme souffrant  de prosopagnosie, explique qu’elle « ne reconnaî(t) personne » : « je vis dans l’ignorance et dans cette ignorance, il n’y a personne ». Dans Les Noyés, un coupable raconte qu’il a laissé  condamner un innocent à sa place. Chaque fois, le narrateur met l’accent  sur l’absurdité de la vie et des faits qui la constituent : « Je ne suis pas plus coupable que d’autres, que tous les autres, ou que vous. Nous sommes tout simplement,  traversés par les faits » (…) « toute la société humaine est un regrettable malentendu ». Très vite, le lecteur-spectateur se rend compte que le spectacle est total.  A l’objet théâtral pur, à ce qui se passe, s’ajoute un théâtre texte, un théâtre de réflexion sur le sens ou plus exactement le non sens de l’existence. Ce ne sont plus de simples états d’âme qui sont donnés à entendre mais des réflexions sur le théâtre avec la mise en abyme de la pièce dans  Mon amour et moi  : « MADAME. Mais on sait comment…/ MONSIEUR. Jouer à Mon amour et moi ! », sur la vie en général.

 

Dans un premier temps, le lecteur-spectateur est une peu dans un univers philosophico-existentiel, dans l’expression « naturelle » du réel d’un monde petit bourgeois qui s’auto analyse. Mais très vite, il constate qu’il n’y a pas que cela,  qu’en plus  le narrateur  jongle avec les sons, les mots : « Mon nom est Claire. C’est drôle, non ? On me disait : « Ton nom éclaire », en crée de nouveaux (« On se câlinoute, mamouroute »). Il joue avec l’écriture, avec  le rythme des phrases souvent proches du vers ou du verset, avec le texte,  plongeant le lecteur-spectateur dans un univers poétique et onirique.

 

2 Commentaires

  1. anne

    bonjour,
    j’aimerais demander à l’auteur pourquoi il pense que toute la société humaine est un regrettable malentendu ? qu’est-ce qui habite cette réflexion :désarroi face à un monde désenchanté ? absence de foi personnelle ? vacuité de l’existence ?
    merci
    Anne

  2. Annie

    Bonjour Anne,
    Merci de votre message. Le personnage a une vision négative du monde dans lequel il évolue. Mais pourquoi en effet ne pas demander à l’auteur lui-même ? Je vais demander s’il a un site où vous pourrez lui poser vos questions. Bien cordialement. Annie