Le Cadeau de Noël
Daniel Abimi
Bernard Campiche Editeur (2012)
(Par Annie Forest-Abou Mansour)
La belle jaquette brillante de l’ouvrage de Daniel Abimi, décorée de rennes scintillants tirant un traineau – vide – sculptés dans la glace, souligne la beauté éphémère de Noël et révèle l’ironie du titre. Le Cadeau de Noël est un roman fondé sur une enquête policière menée juste avant Noël par l’inspecteur Mariani dans une frange glauque de la société lausannoise dépourvue de valeurs morales et humanistes. Quelques jours avant Noël, Elena, une jeune Ukrainienne, employée dans « la station service, Agip, la dernière avant l’échangeur de la Blécherette » qui « fa(it) dans la restauration » est tuée par un professionnel alors qu’elle allait servir des « penne alla carbonara ». Afin d’arrêter le criminel, il faut d’abord « trouver le mobile ». Tous les ingrédients du roman policiers – suspens, action, violence, rebondissements, résolution de l’énigme à la fin de l’ouvrage – sont savamment et judicieusement orchestrés. Le Cadeau de Noël, roman policier à l’intrigue bien charpentée, cultive l’appétit de sensations du lecteur. La narration, contemporaine à l’action, donne à voir concomitamment, sans lien au premier abord, des fragments de vie de différents personnages croqués sur le vif, (Mariani, le policier migraineux, Rod, un journaliste alcoolique, Svetlana Meylan, épouse d’un assureur…) qui se relient progressivement de façon nécessaire.
La bourgeoisie privilégiée et les petits truands hantent sans scrupules les mêmes milieux de la drogue, de la prostitution, de la pornographie et de la violence. Sous le vernis esthétique et policé hypocrite de la bonne société se cachent des êtres vulgaires que « l’odeur de l’argent (…) rend tous délicieux ». La richissime Anne-Sophie Hartmann accueille son cousin « un verre à soda rempli à la main (…) Son haleine dégage(ant) une forte odeur de gin ». Son mari « chirurgien chef à l’hôpital du Samaritain à Vevey » « se commet dans des partouzes », méprisant et réifiant les jeunes prostituées slaves sans papier : « tu lui allonges une baffe avant de la baiser comme si elle était ta chose ». Les enfants, « quatre chérubins (qui) assuraient la partie musicale du réveillon », apparemment des angelots blonds, bien éduqués, sont en réalité de véritables terreurs soutenues de surcroît par leur mère. Déçus de leurs cadeaux, (« Corentin quand il découvrit que le téléphone qu’il avait entre les mains était l’ancien modèle, celui qui était déjà vieux de sept mois (…) commença par devenir tout rouge, poussa un hurlement qui forçait sur les aigues puis jeta son appareil contre le père Noël »), ils lapident le père Noël avec rage et colère. Daniel Abimi décrit avec un réalisme, frôlant parfois l’épique dans ses scènes de violence ou de sexe, un univers corrompu (« L’ordre judiciaire étouffa l’implication de son éminent membre avec élégance »). Il ridiculise et caricature même la haute bourgeoisie aisée. Le roman policier entraîne une critique sociale avec un humour souvent corrosif. La litanie de mots familiers qui circulent dans l’ouvrage restitue la vie de ce milieu sordide dans toute sa spécificité concrète. Le style colle à la réalité vécue. Les apparentes belles manières des bourgeois ne peuvent cacher leur essence débauchée et malsaine. Très vite le vernis s’écaille.
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D’accord. Je consulterai ce site avec plaisir.
Merci de me l’avoir fait connaître.
Annie