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Hors jeu

22/10/2015 | Théâtre | 1 commentaire

HORS JEU

Enzo Cormann / Philippe Delaigue

Distribution :

Texte :  Enzo Cormann       
Mise en scène : Philippe Delaigue 
Création sonore et musicale :  Philippe Gordiani     
Collaboration artistique : Sabrina Perret
Lumière et scénographie : Sébastien Marc    
Costumes :  Arriane Sterp   
Avec Enzo Cormann et les voix deLaurence Besson, Magali Bonat, Gilles   Fisseau, Sabrina Perret, Alexia Chandon-Piazza, Philippe Delaigue, Jean Philippe.           

 

(Par Fabien quintavalle)

 

 Image hors jeu.jpg    « En me radiant vous m’avez effacé de la société des hommes ». Telle est l’accusation fondamentale de l’ex ingénieur Smec contre sa manager du « jobstore » dans la pièce Hors jeu  d’ Enzo Cormann.

 

    D’outre tombe, se réincarne vigoureusement devant nous la mémoire du parcours de vie de ce chômeur de cinquante cinq ans.

 

    Seul perdu dans l’obscurité de la scène, furieux à en perdre la raison, l’ingénieur Smec refuse de se soumettre, alors il questionne, argumente, conteste, proteste,  craque, se reprend, hélas toujours vainement.

    Confronté au jargon impitoyable de madame la manager, invisible voix numérique dictant les procédures à suivre de la façon la plus policée et inhumaine qui soit,  le combat semble perdu d’avance.

    Chair à canon d’hier, chair à chômage d’aujourd’hui, nul là où il est ne se sent coupable, et pourtant Smec  lancera plus tard à sa manager : « vous n’êtes pas en guerre contre moi à titre personnel, mais la guerre économique et sociale fait rage chère madame ».

        Mu par  sa colère, débordé de haine devant  tant d’injustices,  devant  la folie d’un système qui efface la personne,  Smec répond alors par la folie d’un homme resingularisé.  Soudain il  se lève contre ce système qui l’opprime.  Le voila sorti du rang,  Adieu « employabilité », bilan de compétences, coaching, et autres formations humiliantes…

       Pour celui qui subissait, la mascarade est finie, le temps est venu d’agir radicalement.  A ceux qui lui reprocheraient de perdre la raison,  il rétorquera : « N’importe quel article du règlement du Jobstore est plus cinglé qu’une prise d’otages . »

        Hors jeu, hors cadre, hors société, hors couple, hors photo de groupes, c’est le sentiment de la disparition de soi qui prédomine, et, pour exister à nouveau, le recours à la violence n’est plus un choix, mais devient une nécessité à la survie de son identité. « Je commet le pire, mais je le signe en mon nom ». clame t-il !

        Puis comme un ultime fracas advient la violence cinématographique d’une prise d’otages, de la fiction à la réalité,  le pas est franchi, l’irrémédiable sur le point d’être commis… « je suis le film et le film me dévore », réalise- t -il impuissant .

        La colère et le chaos s’empare de l’espace scénique, habilement rendu par une explosion electro acoustique, ainsi que les flash lumineux agressifs des néons blancs.

        Si l’ingénieur Smec est à nouveau quelqu’un à travers son acte de désespoir, il n’échappera pas pour autant à son destin tragique.

          Mais il aura vécu, sous nos yeux et nos oreilles de spectateur embarqué, interrogeant nos consciences dans toute la pluralité et la richesse de son expression, victime et bourreau, vivant et mort, actuel et intemporel.

        Dans ce drame « poélitique », nous en resterons les témoins abasourdis,  Mr Smec vieil homme aigri et peu aimable, s’est bel et bien levé. Légitime pour les uns, inadmissible pour les autres,

         Il s’est levé seul, puis s’est effondré, encore seul, comme un représentant sacrifié, de millions d’anonymes suppliciés.

1 Commentaire

  1. Hélène Venard-Mathieu

    J’ai l’impression que cette chronique est écrite au rythme de la pièce, je me trompe ? Bravo en tt cas ! J’aurais bien aimé assister à la représentation d’Hors-jeu

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