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Clarisse et le singe en morceaux

20/02/2014 | Livres | 3 commentaires

Clarisse et le singe en morceaux        
Laurent Vyeix    
Atome Editions (décembre 2013)

 

(Par Annie Forest-Abou Mansour)

 

   clarisse image.jpg L’élégante et belle Clarisse,   femme dynamique aux magnifiques yeux verts, propriétaire de deux salons de beauté à Paris, mène une vie agréable et  paisible. Seul son mari, Côme,  « petit prof sans avenir », mal dans sa peau, dépressif depuis peu,  lui cause quelques soucis. 

    Puis, brusquement,  la vie bourgeoise agréable de Clarisse   bascule : un sombre individu prénommé Horst, la suit,  la harcèle, la menace par l’intermédiaire de messages sibyllins  de plus en plus inquiétants, rédigés sur des « affichette( e ) bleue ( s ), rectangulaire ( s ).  L’espace se réduit alors  autour de Clarisse. Le danger et la violence la cernent dans son quartier, dans ses salons de beauté puis  dans son appartement jusqu’à son ensevelissement dans une grotte proche de sa résidence secondaire. Cette réduction spatiale,  concrétisation de  son angoisse et  de  sa privation subite de liberté,   intensifie le suspens du roman alerte et haletant de Laurent Vyeix .

   Avec virtuosité, Laurent Vyeix, dans Clarisse et le singe en morceaux,    brouille les pistes et  les repères du lecteur. Dès l’incipit, c’est Côme qui s’amuse à suivre une jeune femme : « Côme la suivait sans entrain, respectant une distance de cinq à dix mètres entre eux, admirant la souplesse des mouvements, le chatoiement du soleil dans la chevelure, le balancement des hanches (…) ». Les leurres se succèdent. Deux intrigues s’imbriquent simultanément : l’histoire de Clarisse et celle de jeunes dealers du lycée où enseigne Côme. L’épisode du  crime, constante  habituelle du  roman policier,  se rapporte à la seconde enquête.  Clarisse ne meurt pas, mais l’éventualité  de son assassinat accroît la tension du récit.  Comme dans tout roman policier, le lecteur se pose des  questions.  Cependant  ces dernières se portent non pas sur la recherche d’un assassin mais essentiellement sur les raisons pour lesquelles un mystérieux homme harcèle Clarisse, introduit une fêlure dans sa vie, la plonge dans un véritable cauchemar.

    Laurent Vyeix bâtit soigneusement son intrigue avec des personnages de chair, d’angoisse, de sentiments, représentatifs de la société contemporaine, appartenant  à la vie quotidienne et banale de tout un chacun. Les différentes techniques narratives, l’alternance des focalisations internes et omniscientes éclairent les pensées, les sensations, les peurs des personnages. La vision externe estompe  la connaissance des faits et accentue l’impression de suspens. Les questions rhétoriques (« Mais alors qu’était Charlaine ? Un tyran grotesque ? Mère Ubu ? »), les phrases souvent courtes, inachevées (« s’il pouvait s’y agripper… »), nominales ou adverbiales (« intellectuellement ») créent un rythme dynamique et oppressant. Le lecteur vibre alors au même diapason que Clarisse et Côme. Les nombreux indicateurs spatio-temporels précis placés en exergue (« Mardi 24 avril. Onze heures », « samedi 28 avril. Onze heures trente »)  rapprochent le texte du journal ou du reportage donnant au récit un caractère réaliste et objectif. La description des caractères denses et typés  des personnages, leurs pensées font évoluer le roman policier en roman psychologique et  en roman de mœurs avant le coup de théâtre final.

    Laurent Vyeix dans Clarisse et le singe en morceaux recherche l’authenticité de la vie.  Il mêle habilement suspens, violence, réflexion, émotion,   lançant  aussi de nombreux clins d’œil humoristiques au lecteur  comme lors de l’arrestation arbitraire  pour prostitution de Côme, travesti en femme, dans les dialogues entre ce dernier  et son psychiatre, ou lorsque le nouveau commissaire divisionnaire explique : « – Oui, je remplace Ben Soussan, parti en retraite. / – Et que fait-il de sa retraite ? / – Il vole. / – Il a changé de camp / – mais non : c’est un excellent pilote. ». Tension et détente se conjuguent et se mettent en valeur à la faveur du comique de mots, de gestes, de situations.

     Les illustrations  esthétiques en noir et blanc de Sophie Ainardi  accentuent  le mystère du texte. Clarisse et le singe en morceaux  permet au   lecteur  d’échapper à la platitude du quotidien, de le mettre entre parenthèses pendant la durée de sa lecture. Clarisse et le singe en morceaux  suscitera un véritable engouement chez les amateurs de suspens.

3 Commentaires

  1. annette Lellouche

    J’ai lu « Clarisse et le singe en morceaux » et j’y ai pris beaucoup de plaisir. Suspense, humour et réalités de la vie mènent le bal !

  2. camille stéphane

    j’ai lu « Clarisse et le singe en morceaux » et j’ai passé un très bon moment. Humour, suspens, je me suis raisonnée pour ne pas regarder la fin plus tôt, mais ce n’était pas difficile, car le récit est prenant. L’analyse des raisons pour lesquelles Clarisse est harcelée donne à ce roman une dimension supplémentaire.

  3. Brigitte

    Il me l’a dédicacé, je l’ai remercié, ouvert et plus lâché, je l’ai dévoré sous le soleil du Nicaragua chez « cousin Pierre » et j’ai plongé dans cette intrigue qui tient en haleine du début à la fin, un vrai régal, on en redemande !!! De la violence, mais juste ce qu’il faut, du suspense à gogo, et un l’humour délicieux, le tout distillé par une plume qui ne néglige pas le réalisme, ce qui en fait un super bon livre. Guettons les prochaines sorties…..
    J’attends aussi avec impatience quand même (sourire) et dans un autre genre, les aventures de Crottiflotte et Merdipleut

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