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Bonjour la Vie !

29/12/2019 | Livres | 1 commentaire

Bonjour la Vie !
Catherine Mauger-Trouiller
Editions BoD (2019)

(Par Annie Forest-Abou Mansour)

Des poèmes et des illustrations se répondent

Bonjour-la-Vie image.jpgBonjour la Vie ! Catherine Mauger-Trouiller salue la Vie et l’honore avec un titre exclamatif rayonnant, joyeux, optimiste, concrétion de ses poèmes, hymne à la Vie sous toutes ses formes, épiphanie de la Vie et de la Nature. Chacun de ses textes est un instantané, la saisie de fragments de temps éphémères et précieux, de lieux remplis de souvenirs, d’émotions, de sensations. Elle saisit l’éclair des instants et les fixe dans des tableaux constitués de mots et de couleurs. Sons et couleurs se conjuguent et communiquent. Face à face, dans l’espace du recueil, mots et peintures se répondent, en harmonie de tons et de thèmes. Ecouter, regarder, voir les textes et les images reliés au rythme des saisons et de la vie.

Une poétique du végétal, de l’animal, du minéral

Catherine Mauger-Trouiller évoque les lieux de l’enfance heureuse perdue puis retrouvée, nature féerique empreinte de nostalgie, le jardin et son « portillon en fer rouillé », ses fleurs discrètement personnifiées, « La rose trémière verticale et altière./ Le lilas violet sur la grille appuyé. / La violette blottie tout contre le pissenlit. / L’aubépine déversant son miel odorant ». Fleurs, femme orgueilleuse (« altière») ou tendre (« blottie»), homme nonchalant, langoureux, (« appuyé »). Sensations visuelles, gustatives, olfactives, auditives, avec les allitérations joyeuses en « i », se tricotent entraînant dans un univers esthétique, léger, aérien pour  « se laisser porter sur les ailes d’un papillon », sur les ailes de la Poésie. Catherine Mauger-Trouiller donne à voir et à entendre toute une poétique du végétal, de l’animal, du minéral, leur beauté, leur pulsation de vie. Percevant la beauté dans la vie la plus minuscule, elle poétise un humble et insignifiant insecte comme le grillon, un prosaïque bernard l’hermite, un « papillon aux ailes de feu ». Elle part du plus petit, l’insecte, pour accéder au plus grand, le héron cendré, puis à la fabuleuse licorne. Inscrits dans le cycle naturel, ces êtres vivants offrent la beauté de leur musique (« Au clair de lune et des étoiles / un grillon solitaire s’attarde sur le seuil de sa porte, / frotte ses élytres et stridule, stridule, stridule … Pendant des heures durant, berce la nuit de son chant »), de leur apparence comme le « ver à soie tiss(ant) son habit de lumière », ou le « héron cendré au long cou, / si élégant dans (sa) redingote grise / frangée de blanc, ourlée de noir ». La poétesse saisit ce que l’habitude empêche de voir, nous faisant accéder, du réel le plus simple, à la beauté la plus fabuleuse et la plus merveilleuse.

Un « royaume de lumière »

Ses poèmes sont reliés au rythme des saisons, au rythme de la vie. « La roue tourne…La roue tourne… », la vie avance, la narratrice, dans une vie parfois ombragée, progresse, toujours animée par la confiance, l’espoir, une vision positive : « Dans le noir ténébreux j’avance / vers une sortie inconnue, lumineuse et certaine ». Les humains au comportement irresponsable nuisent à la terre : « La terre est exploitée. / La terre est maltraitée. / La terre est menacée ». L’anaphore lyrique prouve la lucidité de la poétesse. Mais elle ne dramatise pas, elle choisit l’humour, un ton enfantin, des onomatopées, sifflements de chat en colère, concrétisation visuelle de ses griffes,  pour dire la révolte du volcan personnifié : « Alors je gronde, je gronde… dans mon for intérieur. / Rrrfff… Rrrfff … Rrrfff… / Et puis, tout d’un coup, je crache ma colère / pour rétablir l’équilibre de la terre ! ».

« La Vie en poésie a coeur d’enfant »

« La Poésie est langage de l’âme » confie la poétesse. La Poésie est l’essence de l’Etre, la voix du coeur, la voix de l’enfant sommeillant en chacun des humains, à délivrer, à affranchir. L’enfance : l’innocence, l’authenticité, ce moment où le monde n’est pas investi par médaillon de pierre.jpgl’utilitaire. Dans l’image liminaire du recueil : un gracieux médaillon de pierre emprisonne le visage charmant d’une fillette dont l’artiste seul entend la voix : « Michel-Ange entend / dans le marbre sculpté / la voix de la vie emprisonnée.// « Libère-moi ! » // ricoche la voix / sur le tambour du coeur ». Voix donnée à entendre par Catherine Mauger-Trouiller dans un court texte où la mise en page isole et met en valeur l’injonction. Fillette adorable et mignonne donnée à voir sur une photographie, libre, ayant « décidé » du lieu où elle pourra croquer une pomme. Lili ? . « Lili et la Vie », titre du chapitre. Lili EST la vie. Lili dessine, Lili s’exprime, Lili agit. Le haïku final, « Et l’enfant aux yeux d’or rit aux éclats ! / Délivre la Vie. / Libère l’oiseau en cage… » et l’aquarelle de l’oiseau en vol matérialisent cette libération de la voix, de la Vie de la poétesse faisant parler l’enfant enfouie en elle.

Catherine Mauger-Trouiller pose un regard pur et neuf sur la Vie : le regard de l’enfant. Comme chez Hugo, dans la nature, tout vit, tout possède une âme. La poétesse pense l’univers sur le modèle de la palingénésie : « le manège des saisons », l’éternelle renaissance des plantes, des fleurs, des insectes. Elle fait vibrer la Vie et la beauté par l’art de ses vers, le flux de ses phrases, la coulée de ses images, son souffle poétique. Des anaphores incantatoires, des allitérations et des assonances, des mots repris ou valorisés par l’accent rythmique se colorent dans la plénitude, échos au tempo doux et chantant de sa pensée, de son âme et de son humanisme.

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1 Commentaire

  1. Arbi

    J’apprécie énormément votre témoignage positif que de bonnes idées de l’espoir la vie est belle courte mais il faut la savourer et respecter la terre et tout ce qui s’en suit mais respect