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Un bain de jouvence

19/12/2005 | Livres | 0 commentaires

Un bain de jouvence
Nicole Chaabi

Gaspard Nocturne, 2005

(par Annie Forest-Abou Mansour)

Nicole Chaabi plonge le lecteur dans une fabuleuse fontaine de jouvence aux vertus rajeunissantes et purifiantes. Au fil du texte une conscience anonyme, celle de la narratrice («La petite fille a disparu derrière un nuage, je ne peux la rattraper. Elle était là derrière les rides de la femme… »), d’une fleur, d’un animal, retrouve les origines des sensations et des émotions. Par le pouvoir mystérieux et fort des mots, elle fait renaître le réel, dépouillé du voile des habitudes et des préjugés. Le fonctionnel s’estompe au profit de l’émotion, du Vrai. Le plus ténu des éléments du réel reconquiert sa beauté et sa force, et la vie son sens : « Pourquoi ne pas trouver la beauté dans cette vie quotidienne où chaque jour le soleil se lève, joue à cache-cache avec les maisons puis disparaît derrière la chaîne de montagnes en lançant ses derniers éclairs de chaleur et de lumière dans un chatoiement de couleurs orangé jaune ». Les mots emportent le lecteur vers des ailleurs multiples mais aussi au coeur de son intériorité dans une quête d’absolu et d’harmonie avec le monde environnant. Le mot saisit le fugace, l’arrache à l’éphémère et le fige dans la pérennité et la poésie : « Tous ces mots inconnus, toutes ces paroles silencieuses, toutes ces absences douloureuses, toutes ces failles fécondes, tous ces émotions inoubliables, tous ces rêves insensés, tout cela doit se rassembler pour faire la rivière argentée : la rivière poissonneuses pleine de soleil qui brille dans le lointain…. ».

Dans sa quête, la narratrice retrouve l’homme vrai, celui des origines opposé à l’homme civilisé mais faux et vain : « L’homme civilisé a mis l’avoir avant toute chose, il entasse, il engrange et il meurt désespéré sans avoir su méditer ». Le rêve est accessible à chacun d’entre nous malgré les noirceurs de la vie que Nicole Chaabi ne tait nullement : « La nuit est en nous, la nuit du désespoir ; celle des enfants et des femmes battus, violés, tués ; celle des hommes privés de liberté, torturés, assassinés : celle des armées en guerre et des pays avides de puissance : celle des fanatiques qui se font exploser avec leurs victimes… »

Ce livre sans histoire, au sens propre comme au sens figuré, cette mignardise philosophico-poétique, est un chant inspirant tout à la fois le rêve et la réflexion, un guide pour apprécier les moindres instants de la vie.

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