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Eclats d’islam, chroniques d’un itinéraire spirituel, Karima Berger.

3/05/2011 | Livres | 1 commentaire

 

Eclats d’islam, chroniques d’un itinéraire spirituel
Karima Berger
Albin Michel, 2009

(Par Annie Forest-Abou Mansour)

 

 

Karima Berger a parlé de son livre Eclats d’islam, chroniques d’un itinéraire spirituel  à FORUM  104, 104 rue de Vaugirard, 75006, Paris, le mercredi 16 mars 2011. Ecrivain, novelliste, auteure de nombreux  ouvrages, elle a obtenu en 1998 le prix du Festival du premier roman et en 2008 le prix Alain Fournier.

 

 

 

    image éclat.jpgDans une  République française actuellement troublée, pour ne pas dire emportée, dans un maëlstrom malsain, passionnel et névrotique à propos de la laïcité ou plus exactement de l’islam qu’elle instrumentalise et sur laquelle elle fait une fixation, les analyses mesurées, pleines de recul (la narratrice voit et dit ce qui ne va pas en France mais aussi dans son pays d’origine) et de profondeur de Karima Berger dans Eclats d’islam, chroniques d’un itinéraire spirituel constituent un baume apaisant et instructif. Cet ouvrage brise les clichés. Il  témoigne  que la double culture, l’altérité sont une immense richesse, source de tolérance et d’Amour. C’est une Lumière, une gemme scintillante, éclatante, comme le sous entend le titre et son substantif polysémique « éclats ».

    Eclats d’islam tient tout à la fois du journal (« Ce livre est un journal »), de l’autobiographie (« C’est ma voix »), de l’Essai et de la réflexion historico philosophico religieuse. C’est en même temps un discours poétique de paix, de tolérance, de confiance.
    Dans Eclats d’islam, Karima Berger donne à voir un exil positif, fécond, aux multiples richesses : « Je veux poursuivre cette aventure de l’exil qui n’en finit pas de me nourrir, un exil qui est tout sauf la disparition d’une terre ou d’une culture ou d’une mémoire ou d’une religion. Un exil vivant, vivifiant ». Elle prouve que l’être humain n’est pas une simple et pauvre monade, mais une pluralité complexe et foisonnante  d’une éblouissante somptuosité : « Je suis arabe et française, orientale et occidentale, musulmane et laïque, femme et écrivain, et tant de choses encore qui ne se disent pas. ». Et surtout, elle explique l’islam, le dit dans toute sa réalité, luttant contre les parasitages médiatiques : « (…) ces bruits de fond, ces bruits qui brouillent, qui mentent, qui déforment, qui hantent.(…) ». « Tout pousse à l’amalgame, au brouillage, au dérapage ». Elle démontre que toute lecture parcellaire, orientée, trahit, détourne, corrompt le sens du Livre qu’il soit musulman, juif ou chrétien.  Enlevée de son contexte, une phrase perd tout son sens, en acquiert un autre, devient autre. De ce fait, le lecteur naïf ou mal intentionné risque vite d’être « séduit par l’amalgame ». Comme l’explique Karima Berger, aucun écrit  n’échappe  à ce danger. Mathieu dans son Evangile (X, 34) n’écrit-il pas : « Ne pensez pas que je sois venu  apporter la paix sur terre, je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée »  ou   Luc, (XIV, 26). « Si quelqu’un ne vient à moi et ne hait point son père et sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs, et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple » ? Hors de son contexte, tout message sacré risque vite d’être  déformé, mal interprété.

    Citoyenne du monde, le seul véritable  lieu où réside vraiment Karima Berger est l’écriture qui la constitue fondamentalement : « Une écriture est le seul vrai lieu où j’habite, ma seule véritable appartenance ». Profondément cosmopolite, universelle, la narratrice, comme beaucoup d’êtres humains, chrétiens, musulmans, laïques…  que l’on ne veut pas assez entendre, prône un dialogue islamo-chrétien quand elle fait référence, en l’occurrence, « au pèlerinage où se retrouvent chaque année musulmans et catholiques pour y célébrer le rite des Sept Dormants de la Caverne. ». Seul compte l’être humain et son ouverture à l’Autre.  Peu importe sa nationalité, sa religion. Pourtant la différence effraie au XXIe siècle. Il est regrettable que l’Orient actuel ne soit plus un espace investi d’imaginaire et de rêve comme il l’a été au XVIIIe et au XIXe siècle avec Voltaire, Gautier, Nerval, Hugo, Flaubert… Espérons avec Karima Berger qu’il retrouve son attrait d’autrefois et qu’il fascine de nouveau.

    Œuvre plurielle, littéraire, historique, philosophique, Eclats d’islam est une subtile protestation contre l’instrumentalisation  de l’islam et  un émouvant message de tolérance.

 

 

Les ouvrages de Karima Berger :

L’enfant des deux mondes. L’Aube, 1998, prix du Festival du premier roman.

La chair et le rôdeur.L’Aube, 2002,

Filiations dangereuses. Chèvrefeuille Etoilée, 2008. Prix Alain Fournier

Eclats d’islam, Chroniques d’un itinéraire spirituel. Albin Michel, 2009.

Rouge Sang Vierge, Nouvelles. Editions El Manar, 2010.

 

1 Commentaire

  1. Yvette Wassaf

    Tres interredsant. Bien ecrit

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