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Charles et Aurélien

11/01/2014 | Livres jeunesse | 0 commentaires

 

Charles et Aurélien  
Annette Lellouche      
A5 éditions (novembre 2013)

 

(Par Annie Forest-Abou Mansour)

 

  image aurélien.jpg  Après Gustave (1), vieux chêne, unique ami et confident de Charles, véritable personnage du roman éponyme d’Annette Lellouche, La lettre à pépé Charles (2) évoque la rencontre positivement bouleversante entre Charles, un ancien cordonnier veuf et solitaire et son petit fils Simon. Dans son troisième ouvrage, Charles et Aurélien, Annette Lellouche  donne une suite tout à la fois émouvante et humoristique à la vie de cette famille pendant longtemps désunie, plongée dans la souffrance de la séparation. Les retrouvailles et la réconciliation entre le père et le fils Aurélien  « déchir( ent ) la bure de la souffrance » et enfin « dans les yeux d’Aurélien, une brillance humide chass( e ) le voile qui obstruait son horizon durant toutes ces années. ». Le bonheur s’installe alors dans la famille,  capable désormais, grâce à Simon, de le voir et de le saisir.

    Dans cet ouvrage, Annette Lellouche utilise de nombreux monologues intérieurs, sans toujours s’effacer derrière ses personnages dont les propos sont parfois modelés avec réalisme sur la langue parlée et familière (« Les jeunes hommes montaient à Paris pour trouver du boulot »). Par l’intermédiaire de leurs pensées, de leurs émotions, la narratrice  donne une leçon de vie et de sagesse simple mais vraie au lecteur : « prends le bonheur quand il t’arrive et vis ta nouvelle vie avec triomphe ! ». Elle lui apprend  à goûter chaque instant de l’existence. Elle en dénonce les  erreurs comme les brouilles familiales souvent dues au manque de dialogue, d’écoute  et de compréhension, le malheur et le rejet de l’Autre qui entraînent la haine (Giulia avait dû se sentir rejetée et s’enfermant dans sa peine, l’avait transformée en rancœur et haine »),  les dangers de l’alcool, du tabac : « Une dernière cigarette l’a pris de vitesse et l’emporta dans une dernière quinte de toux ». Au travers de différentes scènes, de descriptions, de réflexions des personnages, l’écrivain conduit, en toute simplicité,  une méditation quasiment philosophique sur la vie destinée non seulement aux enfants mais aussi aux adultes.

    L’écriture d’Annette Lellouche  est nourrie de  réalité et de poésie.  Les  images concrètes et belles, « Le silence a empaqueté la place dans une ouate opaque », les métaphores filées comme celle de la navigation donnant à voir la vie perturbée d’Aurélien (« Durant toutes ces années, il avait navigué dans un bateau sans capitaine. Il lui était quasiment impossible de redresser la barre. Il tanguait au gré des événements, l’aiguille démagnétisée de sa boussole perdait constamment le nord. »),  les anaphores évocatrices de multiples solutions possibles qui scandent les pensées de Berthe,  leur conférant un  caractère lyrique (« Elle songea au notaire (…), Elle songea à passer  une petite annonce (…) « Elle songea à la petite  Eloïse (…), « Elle songea à l’émission » (…) donnent une dimension poétique et parfois pathétique au texte.

    Annette Lellouche chante un cadre provençal esthétique (« Sans parler des tableaux où se prélassaient des champs de lavande au mauve complètement délavé par le soleil qui y avait lézardé, aux taches rouge sang des coquelicots qui déferlaient des collines ».),  la vie de gens humbles,  généreux, attachants, les plaisirs simples et joyeux  comme un pique nique, « réplique vivante du ‘déjeuner sur l’herbe’ de Monet ». Elle révèle son amour des animaux et sa connivence avec la nature : « Un petit lézard des murailles, surpris, se dépêcha de ramper avec agilité sur le mur de la façade. D’un beau gris vert, à la face ventrale jaune pâle et à la gorge mouchetée de noir, il se déplaçait par ondulation à l’aide de ses pattes, de son abdomen et de sa queue (…) ».    
   
Comme toujours, les ouvrages d’Annette Lellouche sont un hymne à la Vie et à la générosité humaine. Il est important, dans un monde où la haine s’insinue, de constater qu’il existe encore des êtres qui font confiance à l’humaine condition.


Gustave : http://lecritoiredesmuses.hautetfort.com/apps/search?s=Gustave

Lettre à pépé Charles http://lecritoiredesmuses.hautetfort.com/apps/search?s=Lettre+%C3%A0+p%C3%A9p%C3%A9+charles

 

 

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