Ce que mes yeux ont vu
Giovanna Zoboli et Guido Scarabottolo
Editions Notari, 2012
(Par Annie Forest-Abou Mansour)
Dès son plus jeune âge, afin de stimuler son évolution cognitive et son imagination, l’enfant a besoin d’être confronté à différents types de stimulations intellectuelles, c’est certain, mais aussi sensorielles, émotionnelles et à des situations variées. C’est exactement ce que propose l’ouvrage Ce que mes yeux ont vu de Giovanna Zoboli et Guido Scarabottolo.
Ce que mes yeux ont vu est un « catalogue du monde », original, présentant des objets, des personnes, des situations diverses, destiné aux enfants de deux à sept ans. Il est dépourvu de texte. Chaque page comporte seulement un titre : « Chaises boiteuses », « arbres coupés », « Tableaux anonymes », « immeubles jamais construits »… et donne à voir au premier abord des objets dépourvus de grand intérêt, – des chaises bancales, percées, à tête stylisée, – des situations banales de la vie quotidienne (une foule anonyme)… Ces objets et ces situations sont montrés aux enfants de façon élémentaire, ludique et humoristique comme leur regard naïf et leur imagination fertile appréhendent le monde environnant. Mais très vite, les parents se rendent compte que ces dessins, tout à la fois simples et esthétiques, qui jouent avec les couleurs, apprennent à regarder l’univers en lui ôtant son voile purement utilitaire. L’objet fonctionnel se transforme en objet poétique donnant à voir les choses devenues « objeux » pour reprendre le néologisme pongien. Et parfois même, ces croquis stimulent la réflexion sans grandiloquence toutefois. Le tragique est occulté, quand il s’agit de traiter de la mort, par exemple, réalité inéluctable et difficile à expliquer à un enfant. La présentation humoristique des squelettes, « personnages oubliés », prouve avec fantaisie que tous les hommes sont égaux devant cette fatalité, qu’ils soient puissants, (le squelette royal avec sa couronne), soldats, (le squelette avec sa casquette militaire), riches, (le squelette et son collier) ou pauvres.
Cette collection d’objets parfois bizarres, cocasses, inutilisables, mais aussi naturels (les arbres), artistiques (les tableaux), culturels (les livres), humains (la foule et ses hommes multiples, interchangeables, privés de communication) confronte l’enfant au monde, lui permettant d’évoluer tout à la fois dans son propre univers mais aussi dans le monde réel, sans que sa sensibilité soit heurtée, tout en enrichissant son imagination et en développant de façon ludique sa réflexion, lui offrant déjà une philosophie de la vie.
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